Philippe Balland nous raconte son record dans le Ventoux
Le 17/092009 Philippe BALLAND
11 Ascensions du Mont Ventoux en 22H 33
J’avais préparé cette expédition depuis début Aout en étant sur de rien, sauf que j’en avais envie… Durant mes vacances du mois d’Aout, je suis allé à l’océan 1 semaine ou j’ai rouloté puis je suis parti dans les Pyrénées ou j’ai commencé à faire du spécifique : Je me faisais un seuil de 30mn à 1h tous les jours. Je suis remonté dans le Jura en passant par le Ventoux pour évaluer la difficulté. J’avais à ce moment là, la certitude que j’allais me lancer.
Question matériel je pense que je n’ai rien laissé au hasard:
- J’ai enlevé le plateau de 50, le dérailleur avant et j'ai mis des boyaux TUFO de 19.
- J'ai conservé un seul plateau de 34 et une cassette de 12/2.
- J’ai maintenu mon Prolongateur SYNTACE qui m’apporte un gain de puissance malgré les avis de certains spécialistes habitués aux CLMs en côte.
- J’ai gardé mes roues LightWeight Obermayer car je pense qu’elles rendent bien en côte si le vent n’est pas trop fort.
- J’ai remis mon dérailleur LightWeight pour gagner encore du poids.
- En véhicule d’assistance : Une 407 coupé
- Un vélo de rechange
Coté matériel pas de soucis. Je savais que si je pouvais être bon c’était dans ma logistique. Coté physique ce n’est pas à 48 ans que j’allais inventer grand-chose. Concernant l’aspect mental, je n’ai jamais été aussi solide car tout ce que j’ai fait ces dernières années m’a apporté de la confiance pour endurer la souffrance durant 24h. Car même si on est bien , dans ce genre de truc on cherche toujours la limite je crois …..
Le problème, c’était quelle date ? Je ne voulais pas trop attendre car j’avais recommencé le boulot (je travail en maçonnerie) et je ne voulais pas avoir de problèmes de fatigue. J’ai donc tablé sur la 3ème semaine de septembre. 15 jours avant je suis allé sur le site afin d’effectuer 3 ascensions et évaluer le rythme que je devais prendre pour tenir 24 H. Je pensais être capable de faire 10 montées, 11 j’en rêvais….
Il était important dans cette aventure de trouver une assistance de choque n’ayant pas peur d’envoyer dans les descentes … J’avais dans mes précédents raids ma femme et Fred Bastien 2 femmes extraordinaires pour l'assistance. Mais là il me fallait 2 personnes dont la dextérité au volant n’est pas à prouver, et avec un calme sans égal. Ce fut donc Olivier Pesenti ancien National et Walter Vase un bon coureur à pied et triathlète, qui ont eu la gentillesse de me permette de tenter ce record.
La date précise n’était pas fixée car je tenais à avoir de bonnes conditions. Je ne voulais pas faire 5 montées et rentrer à la maison à cause du temps. Mais comme à chaque fois que je fais un 24h, je m’astreins à un régime scandinave. Il était clair que je devais impérativement effectuer cette épreuve soit le Vendredi ou Samedi, au pire Jeudi. La météo n’était pas très optimiste pour cette semaine là : seule fenêtre de beau, le Jeudi. Tant pis je tente. Le mardi soir je devais absolument commencer à charger mon organisme en glucide. Le problème, c'était que je n'avais pas encore pas effectué la phase de "vidage" du régime scandinave. Donc au lieu de manger je suis monté sur le home trainer jusqu'à 22H et j’ai attaqué ensuite la phase de surcompensation avec soulagement. Le Malto m’a encore surpris par son efficacité. Je me souviens des pâtes que l’on ingurgitait auparavant qui nous ballonnait le ventre et qui n’avait pas le rendement d’assimilation des produits actuels. Le mercredi soir je sentais déjà que mes jambes allaient bien tourner ...
La nuit n’a pas été bonne, mais j’ai l’habitude et ça ne m’a pas dérangé. Au contraire je pensais à tous les détails et j’avais l’impression que si je gérais bien mes montées j’allais pouvoir tenir 24H.
On a décidé de partir vers 8h30 car la météo annonçait de la pluie le Vendredi matin. Tout était bien préparé et quand j’ai pris le départ, j’étais serein. Mes 2 compères ne pouvaient pas aligner une phrase sans dire une connerie: l’ambiance était au beau fixe!
La première montée a été effectuée a un rythme « bonnes sensations ». Je ne voulais pas en faire trop et j’attendais la réaction de mon corps au bout de la 3ème montée. Je savais que même si je partais relativement doucement, j’allais de toute façon être contraint de baisser de rythme au bout de 4 ascensions si je voulais passer la journée.
A la fin de la 1ère descente, j’avais mal à la tête et même si je savais que l’on était descendu bien assez vite, je ne voulais pas que l’on baisse de rythme tout de suite.
A la fin de la 2ème descente Olivier avait aussi mal à la tête mais pour moi je ne sentais pas d’aggravation et j’espérais que ça passe.
La 3ème montée fut correcte mais je sentais que j’allais bientôt être obligé de passer en mode
Ultra. J’ai fait la 4ème montée en commençant à sentir les dénivelés déjà accumulés et suite au calcul fait par l’assistance je partais pour faire 12 ascensions ce qui me semblait impossible. Je fus donc assez heureux d’effectuer la 5ème ascension à un rythme qui m’assurait presque de tenir les 24h.
On était donc l’assistance et moi-même parti sur un rythme de croisière avec comme objectif ces fameuses 11 montées ; les montées s’enchainaient normalement et les descentes ne nous détruisaient plus. Je m’étais alimenté jusqu'à présent avec des gels sucrés et je sentais que j’allais bientôt attaquer le salé. J’avais pris des aliments que j’aime particulièrement : du saumon, des œufs de truite, du jus de tomate, du gruyère et des gels salés. J’ai bien géré mon alimentation car je savais que la moindre erreur aurait été fatale dans les descentes. J’ai toujours fait l’effort de ne pas manger autant que j’en avais envie mais en fonction de mes besoins.
A chaque descente je me massais les jambes avec une crème décontractante.
De la 7ème à la 9ème, je ne me rappelle de rien, est ce parce que ma femme est arrivée ; elle est parti après le boulot vers 17H pour me retrouver vers 21H. Elle sait que j’ai besoin d’elle quand la nuit arrive !!
La 10ème ascension commençait à être difficile, le vent d’Est se levait sur le sommet à partir du Mont Serein et avec la fatigue et mes roues de 50, j’ai été contraint de m’appuyer sur la rambarde. Heureusement que la fin était proche et que les conditions n’ont pas été les mêmes durant la journée. J’attendais avec impatience le lever du jour et je commençais à croire à mes
11 montées car je me disais que même avec la tempête, je serais capable de monter la dernière.
Le temps ne s’est pas aggravé et malgré le brouillard et le vent je me suis hissé vers ce sommet mythique qui venait d’être dompté à 11 reprises pour la 3ème fois. Je rends un grand hommage à Stéphane Rubio et Jean-Pascal Roux car c’est quand même eux qui ont été les premiers à le faire et qui ont été pour moi une bonne source de motivation.
Arrivé vers 8h à l’hôtel des Tilleuls situé au départ de l’ascension, il s’est mis à pleuvoir et je savais que les Dieux avaient été de mon côté. En plus du bonheur que j’avais, j’ai eu l’honneur de recevoir un appel téléphonique d’Hugues Rico en rentrant dans ma chambre qui avait été averti par Eric Prost sur le déroulement de ma tentative.
La difficulté dans ce genre de défi est de s’adapter à l’amplitude d’altitude et de bien gérer son alimentation dans les descentes pour ne pas être malade. Bien sur il faut se connaître pour effectuer un entrainement personnalisé et se mettre dans la tête le truc en se fixant un objectif qui nous excite au plus profond de soit.
A présent je suis dans une période ou je dois impérativement me reposer pendant quelques semaines si je veux poursuivre dans cette discipline. Je n’ai jamais coupé plus de 3 jours depuis 2 ans…. Et l’hiver 2009 m’a quand même bien secoué!
Je voulais laisser une trace de mon aventure et comme tu me l’a demandé c’est avec plaisir que je t’envoie ce post.
Amicalement,
PHB (Philippe Balland)
Nota1: Merci Philippe pour ce post, qui retrace cette belle journée pour toi. Bravo pour ce record qui en appelle d'autres?
Nota2: Merci pour la conclusion également, que je garde pour moi! Trés sympa de ta part, et heureux d'avoir fait ta connaissance sur le Raid Extrême Vosgien!
Nota3: voici le tableau de route de Philippe:
| Mont Serein | Sommet | Descente | |
| 1 | 1H 06 03 | 1H33 | 16.05 |
| 2 | 1H03 05 | 1H30 05 | 17.25 |
| 3 | 1H04 02 | 1H31 12 | 17.40 |
| 4 | 1H05 02 | 1H33 20 | 18.40 |
| 5 | 1H 18 35 | 1H 50 | 18.40 |
| 6 | 1H 17 07 | 1H 47 35 | 18.20 |
| 7 | 1H18 07 | 1H52 01 | 18.20 |
| 8 | 1H19 08 | 1H52 01 | 20.35 |
| 9 | 1H 22 | 1H54 | 24.00 |
| 10 | 1H 22.50 | 1H56 | 25.01 |
| 11 | 1H 23 | 1H59 | |